La France revancharde veut récupérer l’Alsace-Lorraine à tout prix. L’école apprend l’amour de la patrie, la haine des Allemands. Elle prépare les garçons à la future guerre.
En sus des matières traditionnelles, les garçons apprennent à marcher au pas, et à manier les armes. Des fusils scolaires sont fabriqués, semblables aux armes de guerre mais à la taille des enfants. Des exercices de tir sont organisés avec le concours de l’armée. Après la scolarité, il est bien vu d’adhérer à une société de tir.
1882 Création des Bataillons scolaires
Extraits du Journal officiel
« Le Président de la République française, sur les rapports des ministres de la guerre, de l’instruction publique et des beaux-arts, et de l’intérieur ; Vu l’article 1er de la loi du 28 mars 1882, qui met la gymnastique et les exercices militaires au nombre des matières d’enseignement des écoles primaires publiques de garçons…
Décrète :
1er. Tout établissement public d’instruction primaire ou secondaire ou toute réunion d’écoles publiques comptant de deux cents à six cents élèves âgés de douze ans et au-dessus pourra, sous le nom de bataillon scolaire, rassembler ses élèves pour les exercices gymnastiques et militaires pendant toute la durée de leur séjour dans les établissements d’instruction (Journal officiel du
9. — Le bataillon scolaire ne pourra être armé que de fusils conformes à un modèle adopté par le ministre de la guerre et poinçonnés par l’autorité militaire. Ces fusils, dont la fabrication sera abandonnée à l’industrie privée, devront présenter les trois conditions suivantes : n’être pas trop lourds pour l’âge des enfants ; comporter tout le mécanisme du fusil de guerre actuel ; n’être pas susceptibles de faire feu, même à courte portée. Ces fusils seront déposés à l’école.
10. — Pour les exercices du tir à la cible, les élèves des bataillons scolaires âgés de quatorze ans au moins et que l’instructeur en chef aura désignés comme aptes à y prendre part, seront conduits au stand ou au champ de tir et y seront exercés avec le fusil scolaire spécial dans les conditions qui seront réglées par un arrêté des ministres de la guerre et de l’instruction publique.
Fait à Paris, le 6 juillet 1882. Par le Président de la République : JULES GRÉVY, Le ministre de la guerre, BILLOT, Le ministre de l’Instruction publique, JULES FERRY. Le ministre de l’intérieur, RENÉ GOBLET.
EFFECTIF. — Il y a actuellement en France et l’Algérie 109 bataillons scolaires constitués régulièrement, c’est-à-dire par arrêté préfectoral et conformément aux conditions imposées par le décret du 6 juillet 1882.
Ces 109 bataillons forment un effectif total de 43922 enfants.
Beaucoup de départements n’ont qu’un seul bataillon, mais d’autres en ont plusieurs; par exemple le département de la Seine, dans lequel 24 bataillons, comprenant 12000 enfants, sont parfaitement organisés; puis viennent le Nord (20 bataillons, 6165 enfants) ; la Charente-Inférieure (8 bataillons, 2288 enfants); la Seine-Inférieure (5 bataillons, 1695 enfants) ; la Gironde (5 bataillons, 1024 enfants) ; leDoubs (5 bataillons,1800 enfants). A Belfort 1115 enfants sont répartis dans 3 bataillons.
D’après les rapports annuels des préfets, on constate que l’instruction militaire des bataillons scolaires fait de notables progrès; ces heureux résultats sont dus aux instructeurs qui, pénétrés de la mission patriotique que leur a confiée le gouvernement, se consacrent avec le plus grand dévouement à développer chez les enfants les meilleurs germes de l’instruction et de l’éducation militaires.
1884 : Ernest Lavisse : Histoire de France
Lavisse, créateur du Roman national français réécrit l’histoire. Il y intègre de nombreux héros, déclarés français, que les élèves doivent admirer. Lavisse prend de nombreuses libertés avec les événements historiques, l’origines des personnes citées, les lieux. L’empereur Karl der Große est français, le chapitre des cathédrales est illustré par celle de Straßburg.
« Pourquoi il faut aimer la patrie française : vous enfants du peuple, sachez que vous apprenez votre histoire, non pour mettre dans votre mémoire quelques faits et quelques dates, mais pour graver dans vos cœurs l’amour de votre patrie ».
« Une patrie, c’est un pays dont tous les enfants doivent mourir plutôt que de subir les lois de l’étranger ».
« L’Alsace et la Lorraine pleurent aujourd’hui la patrie dont elles sont séparées, ainsi pleurèrent en 1360, les provinces données aux Anglais ».
« Sur le Rhin, Turenne sauva l’Alsace, un moment envahie, par une admirable campagne où tous les combats furent des victoires ».
« Les chambres adjugèrent à Louis XIV, plusieurs villes importantes parmi lesquelles Strasbourg. Depuis que l’Alsace avait été réunie à la France en 1648, il y avait à Strasbourg un parti français qui souhaitait que cette ville suivît le sort de la province, et unît ses destinées à celles de la France ».
14/07/1884 : Défilés des bataillons scolaires à Paris
Les enfants participent au défilé officiel en chantant des hymnes guerriers
Te souviens-tu des époques fameuses
Où tout Paris admirait nos soldats,
Portant encor dans leurs loques poudreuses
Les souvenirs de glorieux combats?…
Sébastopol cédait à notre armée,
En vingt endroits la France avait vaincu…
On acclamait les héros de Crimée…
Dis-moi, soldat, dis-moi t’en souviens-tu ?
Un peu plus tard, héroïque folie !…
Stérile élan de générosité,
Solférino donnait à l’Italie
Son existence avec sa liberté !
Quand vint, hélas, l’heure de la souffrance,
Quand, pour le sol, nous avons combattu
L’Italien a-t-il aidé la France ?
Dis-moi, soldat, dis-moi, t’en souviens-tu ? Bis
Quels souvenirs ! Saint-Cyr marchait en tête.
Dignes et fiers, passaient nos vieux troupiers.
On saluait-héros de cette fête,
De Reischoffen les braves cuirassiers…
Et maintenant, sur la rive étrangère
Quand nos soldats ont souffert et vaincu,
On félicite… un bataillon scolaire… bis
Pauvre soldat, ah ! t’en souviendras-tu ?