1 au 24 mai 1928 : Komplott Prozess

Compte-rendu de l’Action-Française, journal fasciste & anti-autonomistes.

Ricklin, Schaal, Rossé, Fasshauer sont condamnés à 1 an de prison et 5 ans d’interdiction de séjour.  Les autres accusés sont acquittés

L’issue du procès de Colmar donnait lieu, depuis le début, aux plus sombres pronostics. La marche des débats, l’indécision et les maladresses de l’accusation, l’audace de la défense, faisaient craindre un acquittement général. Le verdict d’hier qui, en acquittant onze des accusés, porte contre quatre autres des condamnations dont la modération avait été suggérée par le ministère public, lui-même, évite à la France et à l’Alsace la catastrophe du déshonneur. Mais fait-il autre chose que sauver la face ?
Sans doute, ce verdict est un témoignage de la persistance du bon sens, de la fermeté du patriotisme français chez l’Alsacien moyen où se recrutent les jurés. Ceux-ci ont eu quelque mérite à ne pas perdre le nord au milieu de la confusion que tant de faiblesses et de fautes avaient laissée se créer autour d’eux. Ils ont eu quelque courage à résister à la pression de l’opinion savamment soulevée autour de ce procès par les amis des accusés. Cela assurément est consolant. Le vrai cœur de l’Alsace est toujours à nous.
Mais le scandale des graves manifestations qui ont salué ce verdict dans la salle et dans la rue montre assez à quel danger le bon cœur alsacien a été livré. Il montre, hélas ! L’acuité et la profondeur de la blessure que garde celui-ci au terme de celte échauffourée confuse où le régime n’a pas su offrir la figure à la fois juste et forte de la France. Ils laissent plus impudentes, plus menaçantes que jamais les forces ennemies qui ont tenté de nous ravir l’âme alsacienne.

Il est grand temps de changer de méthode, de comprendre les déceptions et les mécontentements légitimes qui ont donné des prises à cette tentative impie. Il est grand temps d’y porter remède. Mais nous-savons que ce remède, la République ne l’a pas en elle, et c’est pourquoi les patriotes français ont lieu de demeurer inquiets. – Maurice Pujo

AUDIENCE DU MATIN
Jamais, durant ces trois semaines, nous n’avons vu un public aussi nombreux. La tribune est occupée jusqu’à la dernière place. Dans le fond de la salle se presse une centaine de personnes et nombreuses sont celles qui n’ont pu trouver accès.
La parole est donnée à Me Berthon pour sa plaidoirie. D’une voix qui veut être grave et solennelle, il s’adresse aux jurés : « Nous sommes venus, dit-il à Colmar pour soutenir une cause juste… » Il estime qu’un paradoxe extraordinaire se trouve dans ce procès. « C’est un divorce, dit-il, entre l’administration et le peuple d’Alsace. »
Après avoir fait appel à la raison et au cœur des jurés, Me Berthon affirme que ça n’est pas la langue qui fait la nationalité, et que le pays d’Alsace est de sentiment ‘profondément français. Il estime ensuite que la réconciliation définitive entre la France et l’Allemagne serait susceptible de régler la question alsacienne.
Le peuple d’Alsace, dit-il un peu plus tard, a fait le bilan de notre gestion en Alsace, et il juge qu’une réforme de l’administration est une question urgente.

Puis, l’avocat de Moscou parle des libertés alsaciennes qui, à son avis, ont été sabotées. C’est une nécessité absolue pour, la cause de la paix de résoudre ce problème alsacien. Il en vient enfin au complot. Il se compose, d’après lui, de simples rapports de police. Les affaires à l’Erwinia sont absolument propres et irréprochables. Quant à la Schutztruppe elle ne fut qu’un moyen de défense contre les arguments des fascistes, soutenus plus ou moins ouvertement par ceux qui ont mission de défendre l’ordre et la loi. Il essaie ensuite de disculper chacun des accusés.

AUDIENCE DE L’APRES-MIDI
A la reprise de l’audience l’après-midi, Me Berthon, à propos d’un portrait de Ricklin publié par le Journal, interpelle M. Edouard Helsey qui se trouve dans la salle et qui riposte du tac au tac.
Cela crée un incident qui se termine par l’intervention énergique du président. Berthon s’en prend ensuite à la « presse de l’intérieur », qui fabrique faussement l’opinion. Il termine sa plaidoirie en criant aux jurés : « Nous voulons l’application de la loi dans toute sa rigueur. S’il y a trahison, qu’on les châtie, mais comme il n’y en a pas, acquittez-les purement>
Et l’on entend avec stupeur l’avocat communiste antipatriote s’écrier : « Travaillons ensemble pour le bonheur de l’Alsace et de la France. »

Après une courte suspension d’audience, le procureur général se lève :
« On a fait ici, il, le procès de la France. Mais nous faisons, nous, un procès juridique, et on n’aurait, pas dû oublier que la France s’est saignée aux quatre veines pour rendre l’Alsace heureuse. » Après avoir expliqué aux jurés à quelles peines correspondraient les réponses qu’ils feraient aux questions de la cour, M. Fachot demande : « D’où vient l’argent ? Il est d’origine suspecte et il a en plus servi à on but criminel, » Il termine en «affirmant que les accusés avaient l’intention de ramener l’Alsace au sein de l’Allemagne; Les dernières paroles du procureur général soulèvent les acclamations de la salle.
Mais, à l’extérieur, plusieurs milliers d’autonomistes, rassemblés sur quels ordres ? poussent déjà des hurlements dans l’intention d’influencer le jury.
Les avocats de la défense ont de nouveau la parole : tous affirment l’innocence de leurs clients, «et c’est ensuite au tour des accusés de protester de leurs bonnes intentions.
Le président lit alors les dix-sept questions qui sont posées au jury.

LE VERDICT
Pendant près de deux heures, les jurés se concertent dans la salle des délibérations, cependant que la foule manifeste violemment au dehors.
Enfin, le jury rentre en séance. M. Arbeit, son chef, lit le verdict que nous avons indiqué plus haut.

Une partie de la salle applaudit, l’autre pousse des clameurs.
Certains manifestants renversent des barricades : ou se précipitent vers les condamnés, les embrassent, leur serrent la main. On entend les cris de « Vive Rossé! Vive Ricklin! ».
Ceux des accusés qui ont été acquittés se précipitent, eux aussi, dans les bras de leurs co-accusés. Des gendarmes, des Soldats, baïonnette au canon, tentent en vain de faire évacuer la salle.
Pendant que le présidant faisait donner lecture aux quatre condamnés du verdict qui retient contre eux l’inculpation de complot, on a vu l’abbé Fasshauer et certains des accusés maintenant libres, tendre le poing vers le jury.
Avant de clore là session des assises, le président a remercié les jurés de leur patient labeur.
A ce moment, on a été obligé de faire évacuer la salle par les gendarmes. Des milliers de manifestants attendent la sortie des jurés et de certains journalistes.
(Déjà, dès l’après-midi, au cours d’une suspension d’audience, Edouard Helsey et le collaborateur de l’A. F. avaient été pris à partie par des bandes communistes et autonomistes qui marchaient sous la direction de jeunes abbés.)
Les sapeurs-pompiers étaient sur les lieux et, en prévision de bagarres, avaient mis leurs lances en batterie, ils furent copieusement conspués par les manifestants, de même qu’un peloton de gendarmes à cheval .

A sa sortie de la cour d’assises, le procureur général fut, lui aussi, conspué. On lui lança des mottes de terre, et il dut être protégé par les gendarmes. Le président de la cour et le substitut du procureur furent, eux aussi, accompagnés à coups de pierres.
En revanche, on voit ce spectacle assez Inattendu de Me Berthon, député communiste, traverser la place du Champ-de-Mars sur les épaules de quatre prêtres.
La politique de faiblesse du gouvernement de la République commence à porter ses fruits, et nous avons entendu le député Dahlet crier aux condamnés : « Courage! la lutte commence ! »
D’ailleurs, l’édition spéciale de l’abbé Haegy imprime ce soir : « L’impression est que l’ère de la revanche et de la haine va commencer. »
Après l’audience, une grande manifestation autonomiste et communiste eut lieu à la salle des Catherinettes, où prirent la parole, les avocats des condamnés. A la sortie de cette, séance, des cortèges de manifestants ont parcouru la ville.

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