Le président de la République française à Strasbourg
Il ne nous est malheureusement pas possible, vu le manque de place, de reproduire ici tous les discours importants qui se prononcent un peu partout, à l’occasion de la victoire et de l’occupation de l’Alsace-Lorraine. Notons cependant les paroles fort éloquentes par lesquelles M. Poincaré a pris possession de Strasbourg au nom de la France :« Le plébiscite est fait, a-t-il dit ; l’Alsace s’est jetée en pleurant de joie au cou de sa mère retrouvée. Au moment enfin où arrivent parmi vous le gouvernement de la République et la représentation nationale, c’est dans toute l’Alsace un frémissement et un enthousiasme qui expriment, avec une évidence irrésistible, l’unanimité du sentiment populaire. Certes, pour connaître vos aspirations et vos vœux, la France n’avait pas besoin de ce referendum spontané et de ces splendides manifestations. Elle n’a jamais douté de vos cœurs, et les années qui passaient ne lui avaient rien enlevé ni de sa foi ni de ses espérances. Aujourd’hui, tout l’appareil de mensonge et de haine savante que l’Allemagne avait aménagé pour cacher au monde l’inanité de ses efforts et la persistance de vos sentiments s’est lamentablement effondré. Vous êtes sauvés, vous êtes libres, et demain, vous serez redevenus Français ».
L’Alsace-Lorraine fait penser à ces filles de parents divorcés qui se jettent effectivement en pleurant «au cou de leur mère retrouvée » mais qui conservent une certaine tendresse pour leur père quand même, malgré ses brutalités, parce qu’après tout c’est à lui qu’elles doivent d’avoir reçu une éducation soignée et de riches parures.
Et quand il faut se décider à opter pour l’un ou l’autre, c’est ‘un moment fort douloureux quoiqu’on en dise. Aussi cette affirmation unilatérale et autoritaire de la mère retrouvée sur les sentiments de fidélité de sa fille semble-t-elle quelque peu sujette à caution, et prétendre qu’une manifestation populaire, en présence de fanfares militaires et de tout un formidable appareil de guerre, équivaut à un plébiscite exprimant « l’unanimité du sentiment populaire » est choquant pour tout esprit qui ne se paie pas de mots.
« Vous êtes libres et demain vous serez redevenus français », ça sonne un peu comme le fameux « soyons frères ou je t’assomme !» Vous êtes libres, mais libres seulement de redevenir Français !
Il est fort possible que l’Alsace et la Lorraine préfèrent le gouvernement de la France à celui de l’Allemagne, mais il eut été beaucoup plus conforme aux principes de la liberté des peuples de disposer d’eux-mêmes de consulter effectivement les populations de ces provinces. Peut-être bien qu’elles se seraient prononcées pour l’indépendance et la liberté complète, à l’instar de la Suisse.
La Nation : Organe suisse indépendant – directeur. Jean Debrit. 16/12/1918
ou pourrait-on trouver les photos d’archives de la visite du président Poincaré à strasbourg le 9 decembre1918 . une petite fille de 10 ans a récité une poésie lors de la cérémonie pour accueillir le président. Quid ??
sur le site de Gallica