Durant la première guerre mondiale, 18 500 Alsaciens-Lorrains auraient combattu dans les rangs de l’armée française, selon la fédération des Engagés volontaires Alsaciens et Lorrains.[1]
Cette dénomination d’Alsaciens-Lorrains est trompeuse, car les engagés volontaires ne sont pas tous citoyens du Land Elsaß-Lothringen. L’association dont le siège est à Nancy comprend de nombreux français du département de la Meurthe.
Combien de Poilus Alsaciens-Lorrains sont morts au combat ?
En 1914, l’armée française a arrêté et séquestré dans des camps dit de « concentration » environ 10 000 Alsaciens en âge de combattre. Ils avaient le choix, passer la guerre au camp ou s’engager dans la Légion étrangère. Combien sont morts pour la France ? Le pourcentage est infime, c’est un mystère soigneusement caché. Des Alsaciens-Lorrains Feldgrauen et Poilus se battant à la baïonnette est un pur fantasme.
La convention de La Haye du 18 octobre 1907, reconnue par la France en 1910, interdit à tout belligérant d’obliger les ressortissants du pays adverse à se battre contre ce dernier.
Donc, les Alsaciens-Lorrains, citoyens allemands, n’avaient pas le droit de se battre contre leur Heimat. Pour la plupart, ils ont passé la guerre soit dans les colonies, soit dans les casernes françaises. Ceux qui ont combattu au front sont de rares exceptions. Le dépouillement des registres de décès le confirme.
Les Poilus alsaciens-lorrains, tout comme les séquestrés dans les camps étaient considérés en France comme des planqués. C’était un sujet de moqueries durant la guerre de 14/18, comme en témoignent les illustrations ci-dessous [2]. Qu’importe, on en a fait de vrais patriotes.

« Ils peuvent également villégiaturer dans quelques camps de concentration où ils attendront sans impatience la fin des hostilités et les effets du moratorium ».
Pétition contre le référendum
Le 6 novembre 1918, dans le but d’éviter le référendum prévu en Alsace-Lorraine par la Conférence de la Paix, un Comité d’Alsaciens & Lorrains de la région nancéienne remet à l’ambassadeur des États-Unis, une pétition de 70.000 signatures destinée au président Wilson. Dans sa lettre, le Comité considère les Poilus alsaciens-lorrains comme bien vivants.
« L’initiative a eu un caractère absolument privé et le Comité, pour échapper à tout reproche possible de pression ou de contrainte, a volontairement renoncé à de nombreux milliers de signatures qu’il aurait certainement pu obtenir en Alsace reconquise, parmi les 25.000 jeunes engagés volontaires alsaciens-lorrains et dans les camps de concentration. Le nombre des signatures aurait pu être ainsi doublé ».
Discriminations
En 1929, les anciens Feldgrauen Alsaciens se plaignent des discriminations subies par rapports aux anciens Poilus alsaciens planqués durant la guerre, mais traités en héros. Ces derniers sont dénommés patriotes ou « proscrits de l’Allemagne »[3]
Le chanoine Ritz proteste contre les insinuations que les autonomistes lancent contre les patriotes alsaciens qui furent proscrits par l’Allemagne.
« Par exemple un soi-disant « Feldgrau » écrit au journal colmarien précité une lettre dans laquelle il oppose le sort du « Feldgrau » alsacien-lorrain dans la tranchée à celui du proscrit. On voit le sens de l’opposition Le proscrit était heureux comme un coq en pâte, le «Feldgrau » était malheureux. Le « Feldgrau» regrette aujourd’hui encore de n’avoir pas été « martyr » genre proscrit. Le « Feldgrau » n’aura pas de petit ruban à la boutonnière, le «martyr » en a à satiété, etc.…
Des cérémonies aux Monuments aux morts à la mémoire d’Alsaciens-Mosellans tombés pour la France en 1914/18, sont incongrues.
[1] Annuaire de la Fédération des Engagés volontaires Alsaciens & Lorrains de Nancy
[2] La chasse aux maison boches » de Maurice Radiguet et Marcel Arnac.
[3] Le Temps du 7/04/1929