1926 : Blutiger Sonntag / Dimanche sanglant Colmar

EK 23.08.1926

BLUTIGER SONNTAG – DIMANCHE SANGLANT

Le 22 août 1926, les Autonomistes devaient se réunir pour un meeting à la salle des Catherinettes de Colmar. Cette manifestation était autorisée par la préfecture. Police, gendarmerie et armée étaient chargées de maintenir le service d’ordre. Aucune surveillance de la gare d’où arrivaient de nombreux manifestants et groupes d’anciens combattants pro-français de fascistes et de royalistes armés venus pour casser de l’autonomiste. Toute l’après-midi a été remplie de violences.

Bilan : de nombreux blessés, onze arrestations, dont quatre condamnations d’autonomistes à cinq jours de prison avec sursit pour injure aux forces de l’ordre. Gustave Keppi aurait dit « Pfui les flics. Cela laisse supposer que les sept personnes libérées étaient des fascistes, sans doute grâce à l’intervention du préfet Gasser qui fait venir des casseurs, ou d’Alfred Wallach, président des engagés volontaires du Haut-Rhin. Wallach a fondé en 1928 le « Groupement alsacien d’entente nationale » chargé de lutter contre les Autonomistes.

Le Blutiger Sonntag de Colmar est répertorié parmi la dizaine de dimanches sanglants de par le monde. Il est totalement occulté par la France. Tout au plus peut-on lire : « le 26 août 1926, les autonomistes font le coup de poing contre les patriotes ».

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RICKLIN Eugen

Eugen Ricklin, ancien président du Landtag d’Alsace-Moselle en 1911

Le Nouvelliste d’Alsace du 23 août 1926

 MANIFESTATION AUTONOMISTE A COLMAR

Une réunion de protestation contre les sanctions dont furent frappés les signataires du « Heimatbund » devait avoir lieu hier à Colmar. A cette réunion devaient prendre part, outre le parti du Heimatbund, le parti populaire et le parti communiste.

Il était à prévoir que cette manifestation provoquerait une contre-manifestation et que par la suite de graves incidents seraient à craindre. Grâce au calme et au bon sens de nos populations, qui ne sont pas si révolutionnaires comme voudraient faire croire certains journaux, de graves incidents ont pu être évités. S’il y a et des violences et des provocations, il ne faut certes pas les mettre sur le compte de ces hommes pacifiques, accourus pour entendre des conférenciers et exprimer en toute liberté leur opinion. Mais donnons tout simplement le récit des événements.

Premiers incidents.

La réunion était fixée pour deux heures et demie de l’après-midi. Le conseil municipal avait accordé dans ce but la salle des Catherinettes. Les autorités avaient permis la manifestation et en même temps avaient pris les mesures en mettant sur pied toute la gendarmerie et les agents de police. Toutes les troupes de la garnison étaient consignées.

Vers une heure arriva avec l’express de Mulhouse un groupe de fascistes uni avec un groupe de royalistes, les deux partis antagonistes avaient voulu oublier pour un jour leurs querelles de famille.

A la sortie de la gare un voyageur isolé vint se trouver par hasard au milieu d’eux, et, fut aussitôt entouré, bousculé, frappé à coups de matraques. La personne en question était M le Dr Ricklin qui avait été reconnu. Un jeune homme témoin de cette scène peu galante, voulut protester, mais mal lui en prit : il fut assailli à son tour par une cinquantaine d’individus armés de nerfs de bœufs et de lanières de caoutchouc. Il se défendit dignement et, seule l’intervention d’un chef fasciste put le sauver de pires violences. Il était boche, disait-on. On dut constater par la suite qu’on avait à faire à un Mulhousien, venu à Colmar pour affaires privées et qui a eu la malchance de faire cette mauvaise rencontre. Des témoins ont fait noter l’absence complète en ce moment de la police qui n’ignorait pas cependant l’arrivée des fascistes et des royalistes.

Devant la salle des Catherinettes.

A 1 heure déjà, les abords de la salle des Catherinettes avaient été occupés par les royalistes et les fascistes. Ceux-ci avaient résolu d’empêcher la réunion du Heimatbund. Peu à peu les manifestants arrivaient nombreux et se voyant barrée l’entrée de la salle où devait avoir lieu la réunion ils s’échelonnèrent le long de la rue de la République et de la rue Kléber. Quelques citoyens forts de leurs droits essayèrent de forcer l’entrée de la salle, mais ils furent repoussés par les occupants de la façon la plus brutale. Quelques scènes de pénible violence ont dû être constatées et ont provoqué les protestations de la foule. Plusieurs collisions entre fascistes et manifestants ne purent être évitées par la police. La cavalerie dut libérer la rue, séparant ainsi les adversaires retranchés en deux camps bien distincts ; les cris de Vive la France et vive l’Alsace furent lancés des camps respectifs les royalistes et les fascistes entonnèrent la Marseillaise ; les manifestants chantèrent à leur tour : O Strasbourg, O Strasbourg. La police en ce moment n’eut plus grand travail si l’on excepte quelques petits incidents aboutissant à deux ou trois arrestations sans motifs sérieux. Après deux heures de protestations, les manifestants prirent le parti de s’éloigner peu à peu. Les membres du Heimatbund se rendirent au jardin du cercle St. Martin pour y tenir leur réunion. Les communistes se rassemblèrent dans la brasserie Molly. La gendarmerie en occupa aussitôt l’entrée pour éviter les collisions entre l’un et l’autre camp.

Réunion au Cercle Saint-Martin.

Des manifestants remplirent bientôt la cour du cercle St-Martin. Le Dr. Ricklin harangua la foule et protesta énergiquement contre les violences dont il avait été la victime revendiquant pour chacun la liberté d’exprimer ses opinions. Il parla ensuite du programme autonomiste et du but que poursuivent ses partisans.

D’autres orateurs prirent ensuite la parole, entre autre le professeur Rossé qui fit voter une résolution de protestation contre les sanctions.

À la sortie de la réunion, les manifestants s’attroupèrent dans la grande allée de l’avenue Joffre. Là, il y eut encore quelques incidents entre royalistes et communistes. La gendarmerie à cheval dut intervenir et refoula à plusieurs reprise les manifestants.

Bilan de la journée : 18 arrestations dont 12 ont été maintenues, quelques blessés qui ont dû se faire soigner à l’hôpital. Parmi ceux-ci un gendarme qui dans une chute de cheval a subi la fracture d’un bras.

Le Nouvelliste d’Alsace du 25 août 1926 

QUATRE DES MANIFESTANTS DE DIMANCHE CONDAMNES EN CORRECTIONNELLE

Plusieurs autonomistes-communistes, dont le frère de Keppi, avaient été mis en état d’arrestation pour outrage à la police. Quatre furent maintenus en état d’arrestation et ont passé avant-hier lundi devant le tribunal correctionnel. Ce sont Keppi Gustave âgé de 29 ans, demeurant à Mulhouse, rue de Thann ; Steib Eugène âgé de 19 ans, demeurant 27 rue de la Fecht à Colmar ; Mehlen Emile ouvrier demeurant à Munster et Murbach Adolphe, ouvrier demeurant à Sundhoffen tous appartenant au clan communiste.

Ils étaient défendus par Me Kraeling du barreau de Mulhouse, qui avait été appelé de toute urgence, dès dimanche soir par Rossé.

Me Dreyfus substitut qui occupait le siège du ministère public, dans un réquisitoire très sévère demanda au tribunal de les condamner à une peine de prison.

Me Kraehling plaida l’indulgence et déclara notamment qu’il était impossible d’arrêter souvent les auteurs des outrages dans des manifestations pareilles.

Le tribunal correctionnel a condamné les quatre manifestants à cinq jours de prison sans sursis.

Colmarer Neueste Nachrichten von 25 August 1926

NACH DEN ZWISCHENFÄLLEN VON SONNTAG

Rasche Justiz

Im Verlaufe der Manifestationen vor dem Katharinengebäude und der Brauerei Molly wurden im Ganzen acht Verhaftungen vorgenommen, wovon vier aufrechterhaltenworden sind. Die vier Verhafteten wurden bereits gestern vormittag vor die hiesige Ferienstraftkammer gestellt, um wegen Beleidigung der Gendarmerie in Ausübung ihres Dienstes abgeurteilt zu werden. Es sind dies : Keppi Gustave, 29 Jahre alt, Buchhändler in Mülhausen, Steib Eugène, 19 Jahre alt, Tagner aus Colmar, Mehlen Emile, 33 Jahre alt, Maurer in Colmar und Murbach Adolphe, 24 Jahre alt aus Sundhoffen.

Bei beginn der Sitzung erhob sich der Staatsanwalt, herr Dreyfus, um die Gendarmerie und Polizei zu ihrer Haltung zu beglückwünschen, die, wie er ausführte, durch ihr tatkräftiges Einschreiten grösseres Unheil verhütet habe. Bezüglich der angeklagten widersetzte er sich der provisorischen Haftenlassung.

Auf die Frage des Präsidenten, ob sie sofort abgeurteilt zu werden wünschten, gaben sie, im Hinblick auf die Anwesenheit ihres Verteidigers, Maîtr Kraehling, hierzu ihr einverständnis.

Beim Verhör gab der Angeklagte Keppi zu, beim Eintreffen der berittenen gendarmerie die Ausdrücke « Pfui les flics ! » gebraucht zu haben. Er will dies jedoch nur getan haben, weil er der Ansicht gewesen sei, dass die Gendarmen eine Attacke gegen die autonomistischen Manifestantten reiten wollen. Wenn er gewusst hätte, dass sie lediglich die Ordnung aufrecht erhalten wollten, hätte er sich dieser Ausrufe enthalten, die er bedaure.

Die Angeklagten Steib und Murbach geben zu, ebenfalls wenig schmeichelhafte Ausdrücke benutzt zu haben, doch seien diese nicht an die Adresse der Gendarmerie gerichtet gewesen.

Der Angeklagte Mehlen, Vater von fünf Kindern, stand unter der Anklage, bei der Brauerei Molly den Gendarmerie-Capitaine beleidigt zu haben. Er bestreitet die ihm zur Last gelegten Ausdrücke und will lediglich gesagt haben, der Gendarm – er habe angeblich nicht gewusst, dass es sich um einen Offizier handelt – solle seiner Befehle auf elsässich erteilen, damit ihr alle Leute verstehen.

Der Staatsanwalt verlangte kutz und bündig die Anwendung des Strafgesetzes. Me Kraehling gab sich redlich Mühe, das Vergehen seiner Klienten in miderem Lichte erscheinen zu lassen. Er verlangte für zwei einen Freispruch, während er für die Beiden anderen auf die Verhängung einer Mindeststrafe plädierte. Darauf zog sich das Gericht zur Beratung zurück.

Das Urteil.Einige Minuten später erschien es wieder, um zu verkünden, dass die vier Angeklagten zu je fünf Tagen Gefängnis ohne Aufschub verurteilt seien.

Le Nouvelliste d’Alsace du 25 août 1926 

QUATRE DES MANIFESTANTS DE DIMANCHE CONDAMNES EN CORRECTIONNELLE

Plusieurs autonomistes-communistes, dont le frère de Keppi, avaient été mis en état d’arrestation pour outrage à la police. Quatre furent maintenus en état d’arrestation et ont passé avant-hier lundi devant le tribunal correctionnel. Ce sont Keppi Gustave âgé de 29 ans, demeurant à Mulhouse, rue de Thann ; Steib Eugène âgé de 19 ans, demeurant 27 rue de la Fecht à Colmar ; Mehlen Emile ouvrier demeurant à Munster et Murbach Adolphe, ouvrier demeurant à Sundhoffen tous appartenant au clan communiste.

Ils étaient défendus par Me Kraeling du barreau de Mulhouse, qui avait été appelé de toute urgence, dès dimanche soir par Rossé.

Me Dreyfus substitut qui occupait le siège du ministère public, dans un réquisitoire très sévère demanda au tribunal de les condamner à une peine de prison.

Me Kraehling plaida l’indulgence et déclara notamment qu’il était impossible d’arrêter souvent les auteurs des outrages dans des manifestations pareilles.

Le tribunal correctionnel a condamné les quatre manifestants à cinq jours de prison sans sursis.

Colmarer Neueste Nachrichten von 25 August 1926

NACH DEN ZWISCHENFÄLLEN VON SONNTAG

Rasche Justiz

Im Verlaufe der Manifestationen vor dem Katharinengebäude und der Brauerei Molly wurden im Ganzen acht Verhaftungen vorgenommen, wovon vier aufrechterhaltenworden sind. Die vier Verhafteten wurden bereits gestern vormittag vor die hiesige Ferienstraftkammer gestellt, um wegen Beleidigung der Gendarmerie in Ausübung ihres Dienstes abgeurteilt zu werden. Es sind dies : Keppi Gustave, 29 Jahre alt, Buchhändler in Mülhausen, Steib Eugène, 19 Jahre alt, Tagner aus Colmar, Mehlen Emile, 33 Jahre alt, Maurer in Colmar und Murbach Adolphe, 24 Jahre alt aus Sundhoffen.

Bei beginn der Sitzung erhob sich der Staatsanwalt, herr Dreyfus, um die Gendarmerie und Polizei zu ihrer Haltung zu beglückwünschen, die, wie er ausführte, durch ihr tatkräftiges Einschreiten grösseres Unheil verhütet habe. Bezüglich der angeklagten widersetzte er sich der provisorischen Haftenlassung.

Auf die Frage des Präsidenten, ob sie sofort abgeurteilt zu werden wünschten, gaben sie, im Hinblick auf die Anwesenheit ihres Verteidigers, Maîtr Kraehling, hierzu ihr einverständnis.

Beim Verhör gab der Angeklagte Keppi zu, beim Eintreffen der berittenen gendarmerie die Ausdrücke « Pfui les flics ! » gebraucht zu haben. Er will dies jedoch nur getan haben, weil er der Ansicht gewesen sei, dass die Gendarmen eine Attacke gegen die autonomistischen Manifestantten reiten wollen. Wenn er gewusst hätte, dass sie lediglich die Ordnung aufrecht erhalten wollten, hätte er sich dieser Ausrufe enthalten, die er bedaure.

Die Angeklagten Steib und Murbach geben zu, ebenfalls wenig schmeichelhafte Ausdrücke benutzt zu haben, doch seien diese nicht an die Adresse der Gendarmerie gerichtet gewesen.

Der Angeklagte Mehlen, Vater von fünf Kindern, stand unter der Anklage, bei der Brauerei Molly den Gendarmerie-Capitaine beleidigt zu haben. Er bestreitet die ihm zur Last gelegten Ausdrücke und will lediglich gesagt haben, der Gendarm – er habe angeblich nicht gewusst, dass es sich um einen Offizier handelt – solle seiner Befehle auf elsässich erteilen, damit ihr alle Leute verstehen.

Der Staatsanwalt verlangte kutz und bündig die Anwendung des Strafgesetzes. Me Kraehling gab sich redlich Mühe, das Vergehen seiner Klienten in miderem Lichte erscheinen zu lassen. Er verlangte für zwei einen Freispruch, während er für die Beiden anderen auf die Verhängung einer Mindeststrafe plädierte. Darauf zog sich das Gericht zur Beratung zurück.

Das Urteil.

Einige Minuten später erschien es wieder, um zu verkünden, dass die vier Angeklagten zu je fünf Tagen Gefängnis ohne Aufschub verurteilt seien.

EK 24.08.1926

Lettre ouverte d’ Eugène Ricklin au préfet du Haut-Rhin (24 août 1926)

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